vendredi 6 juillet 2018

Femmes de ménage, nounous, profs particuliers... premiers sacrifiés du prélèvement à la source ?

Par Anthony Cortes

Pour les salariés de particuliers (aide ménagère, garde d'enfants, aide aux devoirs, etc.), le prélèvement à la source est décalé d'un an pour entrer en vigueur en 2020... où ils auront à payer deux années d'impôts. Explications.
La mise en place du prélèvement à la source est pleine de surprises. Et pour les salariés de particuliers, elles ne sont pas forcément bonnes. Dans une interview parue dans le quotidien La Croix, le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a annoncé le report du prélèvement de l'impôt sur le revenu à la source d'une année pour les aides à domicile, catégorie constituée d'aides ménagères, de nounous ou de professeurs particuliers, par exemple. Ils n'auront donc rien à payer en 2019, avant de devoir régler deux années d'impôt en 2020.

Le mécanisme de prélèvement inopérant

Une double addition qui s'explique par un retard. Bercy avait, à l'origine, prévu un système "tout en un" pour récolter cet impôt "à la source". Avec ce système, le particulier-employeur devait simplement verser chaque mois le salaire brut de l'employé à la sécurité sociale qui, elle, devait redistribuer les parts dues aux impôts et à l'employé. Mais ce mécanisme, initialement prévu pour fonctionner dès janvier 2019, n'est pas au point, comme le craignait Cendra Motin, députée LREM chargée de suivre la mise en place du prélèvement à la source. Le gouvernement s'est donc résolu à reporter les grands débuts de ce dispositif pour les salariés de particuliers.
"Ce décalage d'une année est une mesure de simplification, explique Gérald Darmanin à La Croix. Il va nous donner le temps de finaliser le système "tout en un"." Si ce report fait les affaires de l'Etat, c'est moins le cas pour ces salariés...
En 2020, ils auront donc à payer deux années d'impôts. Une conséquence que le ministre des Comptes publics assume. "Il s'agit d'un report d'imposition, précise-t-il. En 2019, ces salariés ne paieront pas d'impôt du tout, sauf s'ils souhaitent opter pour le versement d'acomptes libres au cours de l'année. L'année suivante, à partir de janvier, ils paieront comme les autres salariés leur impôt par prélèvement à la source sur les revenus perçus en 2020. Puis, de septembre à novembre 2020, avec un paiement étalé sur trois mois, ils paieront aussi leur impôt sur les revenus 2019." Pour les 250.000 salariés employés de particuliers redevables de l'impôt sur le revenu, il va donc falloir mettre de l'argent de côté en 2019 pour payer ses impôts en deux fois en 2020.

Une décision saluée par les particuliers-employeurs

Une annonce qui ne fait pas que des mécontents. La Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem) salue, par communiqué, la décision du gouvernement. Une "position de sagesse", selon elle, qui doit permettre la préparation d'un dispositif de prélèvement de l'impôt "dématérialisé" géré par les services de l'Etat. Car les particuliers-employeurs craignaient de devoir eux-mêmes calculer et récolter les impôts de leurs salariés pour ensuite les transmettre à l'Etat, comme n'importe quelle entreprise. De ce côté-là, c'est un soulagement.
D'autre part, la Fepem continue de s'inquiéter pour le versement du crédit d'impôt réservé aux particuliers-employeurs. En employant une aide à domicile, ils bénéficient d'une réduction fiscale égale à 50% des dépenses supportées. Et s'ils ont mensualisé le règlement de leurs impôts sur le revenu, cette ristourne s'applique chaque mois.
Comme Marianne avait déjà pu l'expliquer, les règles vont changer avec la mise en place du prélèvement à la source en janvier 2019. Même si le taux va rester le même, il n'y aura plus de réduction de la note au moment du paiement de l'impôt, que celui-ci soit annuel ou mensuel. Le remboursement du crédit d'impôt se fera en deux temps. Un premier acompte sera versé en janvier, d'un montant de 30%. Et les 70% restants seront versés à la fin du mois d'août. En clair, les employeurs seront contraints de faire des avances de trésorerie à l'Etat d'avril à août...
En tout cas, si le gouvernement s'entête à conserver ce mécanisme. Car, pour soulager leur trésorerie, les particuliers-employeurs demandent que le crédit d'impôt puisse leur être versé chaque mois. "Ce n'est pas envisageable à court terme, répond Gérald Darmanin dans La Croix. La réforme vise à adapter l'impôt à l'évolution des revenus, elle n'a pas pour objet de rendre le crédit d'impôt contemporain des dépenses."


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