lundi 30 avril 2018

Comptes de campagne de Macron : derrière de troublantes ristournes, l'hypothèse de "dons déguisés"



Romain Rambaud, professeur de droit public, estime que la ristourne accordée par l'entreprise GL Events à Emmanuel Macron sur plusieurs meetings de la campagne présidentielle relève d'une "zone grise" difficile à contrôler...

Emmanuel Macron a-t-il joué avec le code électoral ? Depuis que Mediapart a révélé, ce vendredi 27 avril, qu'En Marche avait bénéficié de ristournes intéressantes de la part de l'entreprise d’événementiel GL Events - jusqu'à -50,2% pour le meeting de la Mutualité, le 12 juillet 2016, notamment -, les adversaires du président de la République crient au scandale. Ce d'autant que François Fillon qui a eu lui aussi recours à GL Events, semble ne pas avoir bénéficié des mêmes rabais... Pour autant, impossible d'affirmer avec certitude que le chef de l'Etat a contourné les règles électorales. Explications avec Romain Rambaud, professeur de droit public à l'Université Grenoble-Alpes et spécialiste du droit électoral.

Emmanuel Macron et son mouvement En Marche avaient-il le droit de bénéficier de ristournes de la part de GL Events dans l’organisation de plusieurs meetings ?

Romain Rambaud : Tout dépend des conditions. La règle, inscrite dans le code électoral, c’est qu’une personne morale ne peut octroyer un avantage injustifié à un candidat. Pour une entreprise, proposer des services à un tarif inférieur à ceux qu’elle pratique habituellement est donc formellement et clairement interdit. Cela s’apparenterait à un don déguisé.

"Une personne morale ne peut octroyer un avantage injustifié à un candidat."


Justement, Mediapart relève que François Fillon n’a pas bénéficié de tels tarifs lorsqu’il a passé des contrats avec GL Events.
C’est un peu troublant, mais il faudrait se plonger dans l’intimité du dossier pour en dire plus. Ce qui est sûr, c’est que la pratique du rabais n’est pas en elle-même interdite. Le Conseil constitutionnel l’a clairement établi en 1998. Ce qui compte c'est le caractère habituel ou non de la remise. Pour cela, il faut regarder les pratiques de cette société sur d’autres contrats, les usages du secteur pour ce type de factures et enfin si l’entreprise et En Marche ont développé un lien contractuel particulier, s’il s’agit d’un « bon client » par exemple. On se situe là a priori dans une zone grise, peut-être contestable, mais qui ne peut plus être contestée puisque la commission a validé les comptes de campagne d’Emmanuel Macron sans restriction. A croire que GL Events et En Marche ont su convaincre les membres de la CNCCFP.

Cette validation est-elle définitive ?
Oui. Il n’y a aucune possibilité de revenir en arrière. La seule chose possible sur le plan juridique, si on découvre une malversation quelconque, ce qui n’est pas avéré, c’est que la société soit poursuivie pour « don déguisé ». Depuis la loi sur la confiance dans la vie politique, votée en septembre dernier au Parlement, ce délit pénal est puni de trois ans de prison et 7.000 euros d’amende. A l’époque de l’élection présidentielle de 2017, la sanction était d’un an de prison et 3.750 euros d’amende. Emmanuel Macron ne serait pas non plus à l’abri de poursuites, mais il bénéficie d’une immunité présidentielle pendant toute la durée de son mandat.

Doit-on faire une confiance aveugle à la Commission nationale des comptes de campagne (CNCCFP) ? Ces dernières années, elle est passée à côté de plusieurs affaires.
C’est tout le problème. Vu la multiplication des affaires, on finit par s’interroger sur la crédibilité de la CNCCFP. Ses pouvoirs d’enquête – trop faibles - jettent aussi un doute sur la qualité de l’investigation qui a été menée. Elle juge essentiellement sur pièces, c’est à dire à partir des documents qu’acceptent de lui fournir les équipes de campagne et les sociétés. Elle ne peut pas se rendre sur place, ouvrir tous les tiroirs. A partir de là, il est difficile pour elle de mener un travail indiscutable.

Les candidats en profitent-ils pour jouer avec la loi ?
C’est mon avis. Ce que je pense, c’est que la loi est très restrictive et même trop contraignante. On plafonne les dons, on encadre les pratiques, à tel point qu’il devient difficile pour les candidats de faire rentrer assez d’argent pour mener la campagne. De l’autre côté, la commission n’a pas forcément assez de moyens pour exercer un contrôle minutieux. D’où, pour chaque candidat, comme Emmanuel Macron mais aussi Jean-Luc Mélenchon ou de grands candidats à des élections précédentes, des pratiques dans la zone grise, pas vraiment irrégulières mais qui relèvent de possibles accommodements. La CNCCFP les relèvent parfois et les valident souvent.

Que faire pour éviter que les pratiques des candidats soient systématiquement contestées sur le plan éthique ?
Eu égard à l’importance du sujet, et à la multiplication des affaires, une grande réforme serait bienvenue. Il y a déjà des progrès à faire sur la transparence. Aujourd’hui, aucun compte de campagne n’est accessible en ligne, il faut se rendre dans les locaux de la commission, demander des photocopies. C’est problématique. En plus des moyens d’enquête, cette instance pourrait gagner à ouvrir sa composition. Aujourd’hui, elle est presque exclusivement formée de magistrats honoraires. Faire entrer des experts-comptables, des universitaires, des représentants de partis politiques, des membres d’association anti-corruption pourrait avoir du bon. Surtout s’il s’agit de personnalités motivées pour faire bouger les choses.





Macron voulait Madonna le soir de sa victoire au Louvre



Dans un documentaire de BFMTV consacré à Macron, Laurence Haïm, ex-journaliste qui a fait partie de son équipe de campagne, raconte comment le candidat a pensé à la chanteuse américaine pour célébrer sa victoire le soir du 7 mai au Louvre. Une demande à laquelle Madonna aurait dit "oui"... mais pour un trop gros cachet.

Ce soir du 7 mai, au Louvre, le chanteur pop américain Chris Cab et le groupe Magic System ont célébré en musique la victoire d'Emmanuel Macron sur scène, avant que les DJ Michael Canitrot et Richard Orlinski ne se succèdent. Des invités qui auraient pu être remplacés par... Madonna. C'est en tout cas ce que raconte l'éphémère conseillère du candidat et ancienne journaliste à la Maison blanche, Laurence Haïm, dans un bonus du documentaire de BFMTV Macron à l'Elysée : le casse du siècle.
La demande est faite par Julien Denormandie, alors secrétaire général adjoint d'En Marche et désormais secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Cohésion des territoires. "Je reçois un coup de téléphone de Julien Denormandie, raconte ainsi Laurence Haïm, qui me dit : 'On a pensé à quelque chose pour le Louvre, est-ce que tu crois que Madonna pourrait venir ?'"

Elle raconte ensuite s'être "mise en branle" pour trouver le contact du manager de la chanteuse américaine parmi ses connaissances "à Los Angeles". Manager qui, une fois au bout du fil, n'aurait pas cru qu'elle bossait pour le candidat à la présidentielle : "Je lui dis 'bonjour, je travaille avec Emmanuel Macron'. Il me dit 'ah oui, et moi je travaille avec Dieu'. Et il raccroche." Une fois convaincu de l'identité de Laurence Haïm, le manager n'aurait mis qu'une quinzaine de minutes à revenir vers elle : "Madonna veut venir."
Sauf que faire venir Madonna pour la célébration du French president a, ô surprise, un certain coût (que Laurence Haïm se garde d'évoquer, parlant pudiquement de "conditions financières pour venir"). Reste que la somme est coquette et qu'elle aurait fait renoncer l'équipe de Macron. "A ce moment là, je téléphone au QG en disant qu'elle est d'accord, poursuit Haïm. On me dit 'évidemment, les conditions financières sont impossibles'". Surtout, ce jour-là, l'équipe macroniste vient de découvrir l'existence des Macron Leaks, ce piratage de leurs boîtes mails qui a permis une fuite massive de documents, et ce un quart d'heure avant la fin de la campagne officielle. On y trouvera des échanges classiques sur le déroulement de la campagne, dont En marche avait d'ailleurs reconnu l'authenticité. Des faux documents avaient également été ajoutés dans le but de salir le candidat. Ce 5 mai, deux jours avant son élection et le concert du Louvre, l'heure était donc davantage à colmater les fuites qu'à négocier le cachet de la Madone.

dimanche 29 avril 2018

Rassemblement du 1er mai à Saint-Raphaël

                      RASSEMBLEMENT DU 1ER MAI


 Va-t-on supporter longtemps ce gouvernement qui prend aux plus pauvres pour donner aux plus riches ? Va-t-on laisser se poursuivre le démantélement de la SNCF, la traque aux chômeurs, la chasse aux migrants ? Va-t-on laisser la santé mourir à petit feu faute de moyens, les Ehpad sombrer dans l'indignité, l'éducation nationale fonctionner à deux vitesses (pour les nantis et pour les autres), l'enseignement supérieur s'engager dans une voie de sélection ? Va-a-t-on laisser dire que les retraités sont de riches privilégiés qu'on peut taxer? 

Va-t-on enfin  gueuler un bon coup contre ce gouvernement hautain, méprisant, qui envoie les CRS .pour dialoguer avec les manifestants ? 

Comme dirait François Ruffin (au fait, n'oubliez pas la fête à Macron, le 5 mai, à Paris...renseignements : https://le5mai.fr/. Un bus est en préparation depuis le Var) :  

ce gouvernement, c'est en résumé : tout pour ceux qui ont déjà tout ; rien pour ceux "qui ne sont rien". 

Parce qu'il faut hausser le ton, enfin, rendez-vous pour le rassemblement du 1er mai, la fête internationale des travailleurs, mardi, à 10h30, près du vieux port de Saint-Raphael (à l'embouchure de la Garonne, près du pont) . 

Tous ensemble .....

C.A.
Photo Boris Allin. Hans Lucas pour Libération

samedi 28 avril 2018

Attractivité : l’obsession



En janvier dernier, Emmanuel Macron invitait à Versailles 140 « grands » patrons étrangers dans une entreprise de séduction qui visait à les convaincre de « choisir la France ». En France, l’attractivité est devenue une obsession qui se transmet de gouvernement en gouvernement. Au niveau international ou local, les États et les territoires font régulièrement l’objet de classements relayés par les médias. On entend ainsi que la France retrouve son attractivité, on lit que Londres est la métropole la plus attractive du monde (cabinet PWC). On trouve dans la presse régionale que la Nouvelle Aquitaine est la Région la plus attractive de France (Sud-Ouest), à moins que ce ne soit l’Occitanie (La Tribune) ou la Bretagne (Ouest France) ; chacun s’arrangeant avec ses critères et ses classements.
Que faut-il faire, finalement, pour être un champion de l’attractivité ? Et a-t-on vraiment intérêt à l’être ? Les classements, établis par des organismes privés, peu soucieux de méthodologie, prennent en compte notamment le dynamisme économique à travers le PIB, les investissement publics et privés, la qualité des infrastructures, le niveau d’éducation et la « facilité à faire des affaires ». Moins l’État intervient dans la vie de l’entreprise, plus il permet à son pays d’être un territoire attractif. On s’étonnera peu, dès lors, de voir Hong-Kong, Singapour ou la Suisse truster le haut des classements internationaux.
UN JEU NON COOPÉRATIF
La France peut-elle rivaliser avec ces paradis fiscaux ? Et surtout, y a-t-elle intérêt ? La compétition que se livrent les territoires pour attirer le plus d’investissements possibles s’est traduite ces dernières décennies par une course au « moins-disant » : moins d’impôt, moins de social ou encore moins de normes environnementales. Cette course est vaine et ne se fait pas automatiquement, contrairement à ce qui fut indiqué par l’Elysée lors du Sommet de l’attractivité à Versailles, « au bénéfice de l’investissement et de l’emploi ». Les 25 millions d’euros de subventions publiques accordées depuis 2013 à Ford pour maintenir son activité à Blanquefort, plutôt que de contribuer à la dynamique du territoire, de l’innovation et de l’emploi, débouchent aujourd’hui sur une annonce de délocalisation. Ce jeu non coopératif de l’attractivité est par essence même, et à travers ses conséquences, en totale contradiction avec une politique de développement durable. Une véritable politique d’attractivité à long terme se fonde sur des critères de performances hors-marchés tels que la qualité des systèmes d’éducation et de santé, le dialogue social, la qualité de vie, la capacité à prendre en compte les problématiques environnementales. Mais cela suppose de sortir de l’idéologie du « toujours moins » pour promouvoir une stratégie de développement concertée.
Le reflet qu’offre le miroir de l’attractivité n’est qu’une image éphémère et trompeuse : les premières places du classement n’assurent ni progrès social, ni développement économique durable et renforcent une logique de concurrence qui ne peut faire que des perdants, sauf ceux qui sont aux commandes.
Anne Musson, des Économistes Atterrés

SNCF : des trains annulés hors période de grève ?

Les travailleurs grévistes ont beau dos. Un seul train en 3 semaines sur la ligne qui va de Gap à Grenoble. "La CGT soupçonne la SNCF de ne plus vouloir de cette petite ligne"


Des trains annulés en dehors de la grève ?

Virginie s'attendait à ce que des trains soient supprimés en ce jour de grève, mais n'avait pas prévu les annulations des jours sans grève. En trois semaines de conflit, les trains n'ont roulé qu'une seule fois sur cette ligne. Pourtant, d'après un document interne de la SNCF, des trains sont bien disponibles les jours sans grève. Ils restent curieusement en stationnement. Un cheminot anonyme affirme avoir eu des consignes pour ne pas les faire rouler et avoir reçu l'ordre de "ne rien faire circuler jusqu'à la fin du conflit". Il déclare donc être "payé à ne rien faire". La CGT soupçonne la SNCF de ne plus vouloir de cette petite ligne. La compagnie répond qu'il y a aussi des grévistes les autres jours. La direction régionale assume privilégier les lignes les plus fréquentées.

jeudi 26 avril 2018

TOUS ENSEMBLE POUR DIRE STOP A LA POLITIQUE DESTRUCTRICE DU GOUVERNEMENT

Le gouvernement de Macron, les députés LREM , les médias, défenseurs du libéralisme, stigmatisent les cheminots, les étudiants, les personnels des hôpitaux et des EHPAD, les Zadistes etc ... leur but : NOUS DIVISER ET NOUS MONTER LES UNS CONTRE LES AUTRES.
Salarié·e·s, chômeurs, précaires, étudiant·e·s ou retraité·e·s, nous affirmons notre pleine et entière solidarité avec les cheminot·e·s en lutte pour défendre le service public du rail.
Nous refusons que nos besoins ou nos choix de déplacements soient instrumentalisés par une campagne libérale anti-grève.

La fête à Macron le 5 mai tous à Paris !

SAMEDI 5 MAI 12 h au LOUVRE FAIRE SA FÊTE À MACRON. Puis 14 h à L'Opéra ! 


POUR QUE LE PRÉSIDENT NE SOUFFLE PAS SEULEMENT SA PREMIÈRE BOUGIE À L'ELYSÉE MAIS QU'IL SENTE SURTOUT LE VENT DU BOULET ! Ça fera un an que Macron a été élu, une année à œuvrer comme un Robin des bois à l’envers :  prenant aux pauvres pour donner aux riches. C’est pour les retraité.e.s la CSG en hausse. Pour les locataires, les APL en baisse. Pour les salarié.e.s, moins d’indemnités aux prud’hommes.  Pour les contrats aidés, retour à la case chômage.
 Pour les EHPAD,  « la France n’a pas les moyens budgétaires », selon la ministre de la santé. Mais pour les actionnaires, là, les   « moyens », le gouvernement les a trouvés, et en milliards : suppression de l’impôt sur la fortune, extension du CICE, etc. Pour la répression aussi : équipements militaires pour l’évacuation de NDDL, policiers dans les universités et harcèlement de la jeunesse dans les quartiers populaires...
Partout ça résiste : les cheminots évidemment, les facs également,  Air France, les hôpitaux, les EHPAD, les éboueuses, les caissiers, les électriciennes, les femmes, les racisés, les chômeuses... Si  ces ruisseaux de colère convergeaient, quel fleuve puissant ne formeraient-ils pas ! «

IL Y A AUTRE CHOSE AUSSI, MOINS VISIBLE, PLUS SOUTERRAIN, MAIS PLUS MASSIF, PLUS EXPLOSIF : UN VASTE DÉSIR D'AUTRE CHOSE. » Quoi ? On ne sait pas, ou pas encore. Mais autre chose que  cet économisme étroit, cette bureaucratie qui contrôle, qui « manage », qui évalue sans relâche, qui maltraite. Et qui ne connait rien d’autre que ses ratios. On a envie de respirer ! Et qu’en ce printemps, rassemblé.e.s, on sente notre force bourgeonnante !

 LE 1ER MAI, TOU.TE.S EN MANIF ! LE 5 MAI, TOU.TE.S A PARIS ! #LAFETEAMACRON - 

CONTACT@LAFETEAMACRON.ORG  @LAFETEAMACRON - HTTPS://WWW.FACEBOOK.COM/LAFETEAMACRON/


Un bus devrait être affrété depuis le Var. Prix 80 euros aller-retour. Départ de Fréjus, Brignoles, Toulon. Inscription :  car835mai@gmail.com
Date limite : vendredi 27 avril à 14 h.
Renseignements : 06 11 99 72 50
A bientôt ! 

mardi 24 avril 2018

Grève à La Poste : face à Amazon Prime, le travail bouleversé des facteurs



Par Anthony Cortes

Les employés de La Poste, brandis en exemple par Emmanuel Macron face à ceux de la SNCF, sont pourtant nombreux à dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail depuis la privatisation de l'entreprise publique, face notamment à la pression des géants comme Amazon prime. Un mouvement de grève est même en cours dans plusieurs départements.

"Je suis désolé, La Poste c'est un service public, le postier il fait son métier tous les matins !". Face à des cheminots en colère dans les Vosges mercredi 18 avril, Emmanuel Macron a brandi l'exemple des facteurs pour leur montrer que la réforme de la SNCF n'était pas forcément annonciatrice de conditions de travail dégradées. A La Poste, la bascule a déjà eu lieu en 2010, quand l'entreprise publique est devenue société anonyme. Sauf que huit ans plus tard, les postiers montrés en exemple par le chef de l'Etat sont… aussi en colère. Même si leur action est moins visible que celle du rail, plusieurs centaines de facteurs se mobilisent actuellement dans dix départements. En Gironde et en Ille-et-Vilaine, la grève vient même de dépasser les 100 jours.
"Mon métier a été transformé", nous confie Bruno, facteur depuis plus de 22 ans, désormais en service dans la région bordelaise. Comme beaucoup de ses collègues, il est en grève depuis un peu plus d'un mois, à raison de quelques jours par semaine. "J'ai l'impression d'être un fonctionnaire perdu dans la jungle du chiffre. On subit depuis trop longtemps, on ne peut plus choisir le silence". La cause principale de tous leurs maux, selon lui : le e-commerce. "C'est un modèle qui vient nous percuter. Amazon Prime, Cdiscount ou Ebay ont amené avec eux l'idée que le client doit être livré à tout moment, à 6 heures du matin comme à 21 heures, développe-t-il. Et nous, on doit se mettre à niveau, tenter de suivre le mouvement sans se faire broyer par la machine."

La journée découpée des facteurs

Concrètement, pour mettre ses pas dans ceux d'Amazon, La Poste a d'abord réaménagé les horaires de travail de ses facteurs. Autrefois, le facteur triait lui-même les plis de sa tournée à l'aube avant de les distribuer jusqu'à la mi-journée, avec une pause de 20 minutes à prendre à tout moment. Désormais, il n'aura qu'à recueillir le courrier trié au préalable par du personnel dédié à cette tâche - des "intérimaires", prédisent les syndicats Sud et CGT - mais sa journée sera découpée en deux pour qu'il puisse livrer des colis à tout moment. Il prendra donc son service un peu plus tard, aux alentours de 8h30, puis il devra prendre obligatoirement une pause à la mi-journée, d'une durée de 45 minutes à 4 heures, avant de repartir en tournée jusqu'en fin d'après-midi.
Une bonne nouvelle pour les usagers, que ces livraisons deux fois par jour ? Pas pour tous… Car pour gagner en efficacité et "rationaliser les coûts", l'entreprise a récemment mis en place le dispositif dit "distripiloté". C'est le second pilier du plan, déjà en phase de test sur quelques zones du territoire. Les usagers y sont triés en deux catégories : ceux dont le courrier peut attendre et les autres. Le facteur ne distribue le courrier aux premiers que quelques fois par semaine, et non plus chaque jour. "Pour moi, c'est une discrimination appliquée aux usagers. On s'éloigne de plus de nos missions de 'service public' et notre rôle perd en valeur", regrette Yann, facteur depuis 1998 à la cité Font-Vert de Marseille.

Le postier publicitaire

Et il n'y a pas que sur la distribution que La Poste cale ses pas sur ceux des multinationales d'Internet. Elle tente aussi de capter sa part du marché publicitaire, n'hésitant pas à transformer ses facteurs en hommes et femmes-sandwiches. A leur tournée, les postiers peuvent en effet depuis 2016 voir se greffer une "remise commentée". Là, le facteur ne doit plus délivrer un colis mais… un message publicitaire, à l'oral. "Cela peut être la promotion d'une mutuelle ou une réduction sur certains produits dans une grande surface", décrit Pascal, facteur à Saint-Étienne-de-Montluc (Loire-Atlantique), qui a dû se prêter à l'exercice quelques fois. Sur son site, l'entreprise vend ce "service" comme la possibilité offerte aux entreprises de bénéficier de "campagnes de communication (qui) gagnent en profondeur, gage d'un impact plus fort et pertinent". Difficile d'estimer à quel point ces prestations sont sollicitées par les entreprises : contactée, La Poste n'a pas donné suite à nos demandes.

Pour justifier officiellement les nouvelles missions confiées aux facteurs, La Poste communique sur une réorganisation nécessaire face à une baisse du volume du courrier estimée à 30% entre 2008 et 2015. Sauf qu'aux yeux des concernés, le rôle des facteurs ne se limite pas qu'à mettre une lettre dans une boîte. Comme Pascal, tous insistent sur leur mission "hors cadre" mais "essentielles" de lien avec la population. Notamment vis-à-vis des personnes âgées isolées, dont le passage du facteur est bien souvent le seul lien de la journée. "Parfois, ces gens-là vous attendent devant leur boîte aux lettres. Mais aujourd'hui, il est difficile de trouver le temps de s'arrêter pour échanger quelques mots", regrette-t-il. La faute au logiciel "Georoute", dont la mission est de suivre le facteur à la trace : "Le temps de travail des agents est cadencé, normé… Jusqu'au temps de séjour devant chaque boîte aux lettres".

Mais n'allez pas penser que La Poste a abandonné sa mission de service public de proximité… C'est juste qu'aujourd'hui, objectifs de rentabilité obligent, elle le facture. Proposant ainsi plusieurs nouveaux services comme le dispositif "Veiller sur mes parents" : le facteur passe rendre visite à vos aînés pour "maintenir le lien social", selon la brochure de l'entreprise, mais aussi pour un montant forfaitaire allant de 39,90 euros (une visite par semaine) à 139,90 euros par mois (six visites par semaine). "On monétise la relation", observe Pascal. Et avec le nouveau plan de la direction, les initiatives du genre pourraient se multiplier comme la création d'ores et déjà annoncée d'un service d'aide à la rédaction de sa déclaration d'impôt. les facteurs n'ont pas fini de multiplier les casquettes.

LES VIEUX SE REBIFFENT ...


dimanche 22 avril 2018

SNCF : D'OÙ VIENT (VRAIMENT) LA DETTE ?




Ces derniers jours, les communicants de l'Élysée tentaient de décrédibiliser la SNCF en mettant l'accent sur la dette de la compagnie. Mais cette dette, d'où vient-elle vraiment ? Pourquoi a-t-elle explosé durant ces 10 dernières années ? Les réformes en cours vont-elle la résorber ou, au contraire, la creuser encore plus ? Diffusez cette vidéo autour de vous si vous jugez notre analyse pertinente.

Tout va bien









A la Sommes Nous Complètement Fous (SNCF)


 


Un simple constat …








vendredi 20 avril 2018

Sous Macron, "la fracture sociale s'amplifie"


Entretien

Propos recueillis par Emmanuel Lévy

Pour Gaël Brustier, politologue et membre de l'Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès, le constat est cruel : la politique du gouvernement creuse l'écart entre la France des grandes métropoles et la France périphérique.

Vingt-trois ans après le slogan sur la fracture sociale qui avait porté Jacques Chirac au pouvoir et un an après son élection, Emmanuel Macron semble submergé par le ressentiment des classes populaires ?

Gaël Brustier : Les fractures françaises n'ont fait que croître depuis 1995. La très large victoire d'Emmanuel Macron en 2017 masque le creusement du fossé qui sépare les deux France. Comme Christophe Guilluy l'a mis en lumière, la France qui réussit, celle des métropoles pleinement intégrées dans la mondialisation, construit sa prospérité tandis que la France périphérique en paye le prix au travers de l'accentuation de la concurrence internationale, de la réduction des solidarités et des protections de l'Etat. A la clé : un chômage de masse, des salaires qui stagnent et un sentiment d'abandon. Ainsi, même si Emmanuel Macron a gagné en 2017 face à la candidate du Front national, la carte de la France périphérique est-elle aussi celle en négatif du vote en sa faveur. Au terme d'une année d'exercice, le constat est cruel : cette fracture sociale s'est amplifiée. Jamais l'écart entre les cadres et les classes populaires n'a été aussi élevé. Les premiers le plébiscitent à 65 % quand les seconds sont à peine plus du quart à lui faire confiance.


"Ses interventions donnent l'impression d'une présidence Wikipédia"
Cela vous étonne ?

Non. En France, comme d'ailleurs dans les sociétés occidentales, le vrai clivage politique se confond désormais avec cette disparité territoriale née de la métropolisation. On le voit avec la carte du vote pro-Brexit, ou, d'une certaine manière, aussi avec le vote Trump. A juste titre, les classes populaires se vivent comme les perdantes de ce nouvel équilibre, et elles réagissent en votant contre ceux qui s'en font les promoteurs. Pour faire simple, les « candidats Juncker », le patron de la Commission européenne. Même s'il adopte la posture gaulliste que lui offrent les institutions de la Ve République, Emmanuel Macron s'inscrit pleinement dans la continuité des politiques d'accompagnement de la globalisation. C'est-à-dire plus d'ouverture, plus de libéralisation, plus de dérégulation. Plutôt que d'une posture gaullienne, ses interventions donnent l'impression d'une présidence Wikipédia. Une sorte de concours permanent de culture générale, dont l'unique vainqueur serait évidemment l'unique candidat. 

Pourtant, le président tend la main aux territoires périphériques, notamment au travers du plan de revitalisation des centres-villes des petites aires urbaines. Ou encore via une politique scolaire volontariste en banlieue…

Il y a bien un plan de revitalisation des centres-villes, mais c'est une fiction. Lorsqu'il était ministre de l'Economie, Macron a ouvert les vannes du développement des zones commerciales périphériques. Comme l'a récemment montré Jean-Laurent Cassely, l'hypermarché, et son environnement de franchises, de Buffalo Grill à La Pataterie, a déjà largement redessiné l'espace de vie des Français. A la clé : toujours plus de kilomètres à parcourir tant pour les loisirs que pour aller au boulot, et une qualité de vie au travail comme en famille dégradée. Et ce alors même que, sous couvert écologique, les taxes sur le gazole explosent. Tous les efforts de communication n'y feront rien, les Français perçoivent cette injonction paradoxale. Tout comme ils ressentent que la réforme de la SNCF est aussi une dégradation de leur bien-être. 



Et sur la banlieue ?

Je vais laisser de côté les questions identitaires qui taraudent nos sociétés occidentales. Il y a deux questions qui travaillent Emmanuel Macron. Ne rien lâcher sur le protectionnisme, qu'il considère, à tort à mon sens, comme le mal absolu. Et sur le fait qu'il y a un sujet qui le sépare, lui le représentant de la gauche dite « libre », de la gauche statutaire, celle réactionnaire qui défend les cheminots : permettre à chaque jeune sans qualification d'être un chauffeur Uber. C'est caricatural au premier abord, mais c'est bien cela qui transparaît de son travail comme rapporteur de la commission dirigée par Jacques Attali sur la libération de la croissance. Sur le papier, ça promet. Donner du travail à ceux qui en sont privés et en sont loin. Sauf que, après presque dix ans, les chauffeurs sont fatigués. A 35 ans, on ne fait plus aussi volontiers ce que l'on faisait à 25 ans. Ils veulent des droits. Et, on l'a vu, il y a là une vraie révolte sociale. Tous ces jeunes, qui ne le sont plus à 35 ans après dix ans d'un travail harassant, ne sont pas des entrepreneurs ravis de bosser au Smic pour 50 heures de travail


Vous parlez de révolte, de creusement de la fracture sociale. Mais Emmanuel Macron semble plutôt confiant…

Pourquoi ne le serait-il pas ? S'il n'a pas su réconcilier les deux France, il a su le faire du bloc bourgeois, le bloc central, au sens de l'échiquier politique. Autour du petit noyau des grands gagnants de sa réforme fiscale se forme un agrégat de 30 % de la population française. Une sorte de giscardisme à l'envers. Valéry Giscard d'Estaing en rêvait, Macron l'a fait : unifier deux Français sur trois… mais contre lui. En face, ce bloc est scindé. Les deux autres parties, constituées de La France insoumise et du Front national, sont incapables de construire une majorité. Et elles-mêmes sont tiraillées en leur sein par l'opposition entre une composante identitaire et une autre souverainiste, pour faire simple. Si Jean-Luc Mélenchon a bien obtenu 7 millions de voix, il lui faudrait pouvoir s'étendre sur la question républicaine pour capter l'électorat populaire ouvrier, quand pour l'heure le bleu de travail vote plus volontiers pour le bleu Marine. Mais, avant l'échéance présidentielle, il y a les municipales. Et on perçoit bien les limites d'un parti sans militant, comme l'est La République en marche. C'est la ruée vers les postes électifs. A Dijon, il y a 15 candidats qui sortent du néant pour se disputer l'étiquette LREM. En attendant, Emmanuel Macron utilisera à fond les possibilités que lui offre la Ve République pour jouer sur la corde sensible patriotique, ce qui en France se confond en pratique avec la majesté de l'Etat. L'évacuation musclée de Notre-Dame-des-Landes s'inscrit dans cette stratégie. Paris vaut bien une ZAD.

lundi 16 avril 2018

Une soirée avec le Fralib


Les mensonges du président décryptés par Reporterre.

Une analyse interessante du site Reporterre, le quotidien de l'écologie,  sur les propos de M.Macron  A lire attentivement .....

Les mensonges sanglants de M. Macron

16 avril 2018 Hervé Kempf (Reporterre) 

     
M. Macron a exprimé dimanche 15 avril une position sans concession sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes. S’appuyant sur un apparent bon sens et sur de fausses évidences, son discours est viscéralement mensonger. Et dangereux.
Dimanche soir 15 avril, le président de la République, Emmanuel Macron, a répondu longuement aux questions de Jean-Jacques Bourdin, de BFM, et d’Edwy Plenel, de Mediapart. Quelques minutes de ce long échange ont été consacrées à Notre-Dame-des-Landes. Vous pouvez en lire le décryptage complet ici. Ses propos, loin de contribuer à un apaisement nécessaire, annoncent une volonté de recourir encore davantage à la force. Mais les arguments de M. Macron sont très mal fondés, pour ne pas dire mensongers. Décryptage.
  • « Alors que le projet a été abandonné, les gens continuent à protester. » Non, les zadistes ne protestaient pas après l’abandon du projet d’aéroport en janvier. Au contraire, ils s’en sont réjouis, et depuis, se tournaient vers l’avenir en développant les projets de toutes natures, à base agricole, qui ont été lancés tant bien que mal depuis des années. Ce contre quoi ils se défendent maintenant, c’est contre l’opération militaire qui crée le désordre sur ce territoire.
  • « On va voté un référendum local ». Non, il n’y a pas eu de référendum, et le président de la République, gardien des institutions, devrait le savoir mieux que quiconque. Il y a eu consultation. La différence ? Un référendum est une convocation du peuple souverain, dont la décision, exprimée par le vote, s’impose avec la force de la loi. Une consultation, eh bien, c’est une consultation : on prend l’avis des gens, mais sans que cela ait de conséquence juridique. De surcroît, cette consultation sur le projet d’aéroport était biaisée dans son principe, puisqu’elle ne concernait que les habitants de la Loire-Atlantique, alors que l’aéroport, dit « du Grand ouest » concernait les régions de Pays-de-Loire et de Bretagne, dont les habitants auraient dû participer à la consultation. Si cela n’a pas été fait, c’est parce que les dirigeants de l’époque sentaient bien que le résultat serait négatif.
  • « Pourquoi les gens qui étaient à la ferme des Cent Noms depuis dix ans, ils n’ont jamais voulu créer une de ces formes là ? » [forme collective d’exploitation agricole]. Mais parce que c’était impossible ! Pendant toutes ces années, le territoire et ses habitants étaient en lutte contre le projet d’aéroport et devaient faire face à des menaces récurrentes d’opérations policières. Cela n’aurait eu aucun sens de former un dossier officiel qui aurait été évidemment refusé puisque les terres devaient être occupées par un aéroport.
  • « Je vais avoir moi un projet alternatif, je vais aller m’installer dans votre salon… » Cet apparent bon sens est foncièrement malhonnête, puisque les habitants de la Zad occupent des terres publiques, qui n’ont aucune destination précise depuis plusieurs mois. Il n’y a pas ici d’atteinte à la propriété privée.
  • Le point d’orgue de la supposée démonstration mérite d’être cité en long : « Et pour nos concitoyens les plus modestes, le retraité, la personne qui paye ses impôts, qui paye pour avoir une maison, qui paye son loyer, paye dignement ses impôts, et l’agriculteur qui paye ses terres… vous pensez que je peux maintenant aller lui expliquer : “Il y a des gens qui ont une idée formidable, une idée fumeuse, ils payent pas les terres, se conforment à aucune règle, produisent du lait sans aucune règle… Les règles de santé publique, c’est pas les leurs, ils ont un projet alternatif, c’est formidable, on paye plus rien, il n’y a plus de règles. Je peux les regarder en face ? »
    • La ficelle est trop grosse : diviser les gens, les petits, qu’ils se jalousent, qu’ils se haïssent entre eux. De la part de celui qui a encore allégé l’impôt sur les grandes fortunes, invoquer l’égalité devant l’impôt est d’un cynisme achevé. Mais ne doutons pas que cela puisse marcher. Il faut donc démonter cet argument.
    • D’abord, il est fort probable que vu la façon de vivre très sobre des habitants de la Zad et leurs faibles revenus monétaires (c’est un choix pour beaucoup d’entre elles et d’entre eux), ils ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu.
    • Ensuite, s’il s’agit de faire payer les impôts, pourquoi ne pas avoir envoyé 2.500 gendarmes contre la multinationale Amazon — entre autres — qui a longtemps pratiqué une évasion fiscale faramineuse ? Ce n’est que récemment qu’un compromis a été trouvé avec l’administration fiscale, qui reste d’ailleurs secret, et ne nous dit pas ce qu’a effectivement payé Amazon. On attend donc la même férocité de M. Macron à l’encontre de tous ceux qui pratiquent l’évasion fiscale pour un montant évalué par les experts à 60 milliards d’euros par an.
  • « La République, c’est permettre des projets alternatifs, nous en avons sur le terrain avec des gens sérieux. » Ah bon ? De quoi s’agit-il ? En matière agricole, la situation empire au contraire, avec des difficultés énormes à l’installation des jeunes paysans, avec un système verrouillé par les chambres d’agriculture et la FNSEA, qui privilégient l’agrandissement des exploitations existantes, avec une politique par exemple contraire au pastoralisme ou remettant en cause les aides aux territoires défavorisés.
  • « Une soixantaine de gendarmes ont été blessés lors des évacuations. » C’est exact. Les plus gravement atteints l’ont été par l’explosion d’une grenade explosive dans leurs propres pieds, à la suite d’une mauvaise manipulation, le lundi 9 avril — une information sur laquelle les autorités maintiennent un secret pesant. De même qu’elles laissent utiliser des grenades dangereuses et à la composition toujours inconnue, alors que de nombreux signes laissent penser que leur dangerosité est accrue. Tant pour la santé des civils que pour celle des militaires, il est indispensable que la transparence soit faite sur ces armes.
  • « L’ordre républicain. » L’expression est répétée quatre fois dans ce passage. Mais l’ordre républicain est un pur effet de style, qui n’a aucun contenu juridique précis (à la différence, par exemple, du concept d’« État de droit ». En fait, cette expression répétée comme une incantation a un rôle idéologique précis : faire accepter une politique « d’ordre », c’est-à-dire autoritaire et répressive, en l’habillant de la valeur positive que représente la République.
  • La démarche idéologique de M. Macron apparaît encore mieux dans la phrase suivante : « On n’unira pas le pays par l’inaction [face] à la tyrannie de certaines minorités, habituées à ce qu’on leur cède en refusant de transformer le pays. [Transformer le pays,] c’est le mandat pour lequel j’ai été élu. » Les zadistes — comme les cheminots, les étudiants, les salariés des Ephad, les éboueurs, etc. — seraient des minorités qui exercent des tyrannies. L’inversion du langage est une ruse du pouvoir : le tyran accuse les rebelles de son propre vice. Quant à l’enjeu essentiel, il est de « transformer le pays » : en imposant sa façon de transformer le pays qui est, on le sait, le néolibéralisme à plein, et donc en refusant, en écrasant, en récusant toute possibilité alternative, coopérative, collective. Précisément ce que représente la Zad. Et c’est pourquoi il faut l’écraser. Par la force, par la tyrannie, par la brutalité. Les mensonges de M. Macron poussent au désordre, au rapport de forces, à l’affrontement. À la violence. Ce sont des mensonges sanglants.



dimanche 15 avril 2018

Un Stop Macron marseillais festif et déterminé

Nous y étions, samedi, et il faisait bon remonter la Canebière depuis le vieux port en compagnie de milliers de personnes, qui, toutes portaient un message pour Macron. Leurs pancartes parlaient de paix à préserver, de services publics à défendre, de rails en danger, d'Ehpad au bord de la rupture,  d'étudiants inquiets, de retraités en colère  ....
Ce fut un long cortège (plus de 50 000 personnes selon  les syndicats) festif, sérieux et déterminé, qui déferla dans Marseille. Aucun  incident n'est venu émailler cette grande promenade au coeur de la cité phocéenne. Il faut dire qu'aucune force de sécurité n'est venue nous encercler non plus...
Une chaleureuse manifestation qui en appelle d'autres et dont ces quelques images ci-dessous raconteront la force et la gaîté. Rendez-vous au plus tard le 5 mai pour "la fête à Macron". Un an de règne, ça se fête, par Jupiter, et François Ruffin a quelques idées sur la question. Nous en reparlerons bientôt !
C.A.














samedi 14 avril 2018

Comment stopper Macron?

Plutôtque de regarder les médias dirigés par les milliardaires de ce pays,

Regardez ce débat d'une très grande qualité 



Découvrez le nouveau numéro de l'émission #LeMondeLibre présenté par Aude Lancelin. Le thème de ce soir : "Comment stopper Macron ?" Nos Invités seront Daniel Labaronne, Monique Pinçon-Charlot, Nicolas Baverez, Henri Sterdyniak et Bérenger Cernon.


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vendredi 13 avril 2018

A droite toute Emmanuel Macron, le liquidateur Par Soazig Quéméner et Louis Hausalter

Il fait table rase. De tout. Des partis politiques traditionnels, du dialogue social à la française, de la séparation de l'Eglise et de l'Etat… Mais, à trop bousculer le pays, Emmanuel Macron ne risque-t-il pas de le fracturer profondément ?
Et s'il fallait pour une fois rendre grâces à François Hollande ? D'un trait assez fielleux l'ancien président de la République a fracassé le nouveau monde selon Macron. « L'ancien monde a un nom, cela s'appelle la démocratie. Avec des partis politiques, des syndicats, un Parlement et des élus, une presse », a-t-il déclaré, selon des propos rapportés par le Monde au moment où son successeur semble avoir érigé ce dégagisme en mode de gouvernance. Car, de façon toujours plus flagrante, Emmanuel Macron traque les reliquats du « monde d'avant ». Et les corps intermédiaires, ces « institutions de l' interaction », comme les définit l'historien Pierre Rosanvallon, se révèlent comme les premiers martyrs de sa cause. Les derniers faux-semblants ont même disparu avec la réforme ferroviaire : aux yeux du gouvernement, quelle que soit la puissance de la grève à la SNCF, les syndicalistes sont relégués au rang de figurants. Même les réformistes ne sont plus considérés comme des partenaires privilégiés. C'est la première fois qu'un président ne se cherche pas d'allié, se sont inquiétés les vieux routiers des négociations sociales. « Aujourd'hui, on n'est ni dans la concertation ni dans la négociation, mais dans la consultation. Cette méthode Macron, utilisée également au moment des ordonnances de la loi Travail, a considérablement affaibli dans le corps syndical les leaders réformistes », observe l'universitaire Rémi Bourguignon. Une évidence qui apparaît à la sortie des interminables réunions avec la ministre des Transports, Elisabeth Borne, que les réformistes de l'Unsa quittent encore plus fâchés que le représentant de la CGT !
Mais que peut, au fond, Elisabeth Borne ? En s'entourant - à l'exception de Jean-Michel Blanquer - de ministres technos ou trop soulagés d'être rescapés de l'ancien monde pour moufter, Emmanuel Macron a tué une certaine forme de débat politique. Plus une tête ne dépasse ! Pour qualifier cet autoritarisme, le député socialiste Boris Vallaud, ancien condisciple de Macron à l'ENA, exhume son plus beau latin : Quod licet Jovis, non licet bovis (« Ce qui est permis à Jupiter n'est pas permis au bœuf »). Un choix d'autorité dont le locataire de l'Elysée ne finit pas de payer le prix : le manque de ténors pour monter au front se fait cruellement sentir. Elisabeth Borne a beau être envoyée au combat, son manque de notoriété et de poids politique reste indéniablement un handicap. « Elle connaît bien le sujet, elle connaît peut-être moins bien la politique », sourit Dominique Bussereau, titulaire du portefeuille sous Sarkozy. Où l'on touche la limite du gouvernement d'experts installé par Emmanuel Macron. « On n'arrive pas à parler à certaines catégories de la population parce qu'on manque de figures empathiques, regrette une députée LREM. Les sujets qui bloquent aujourd'hui, que ce soit la loi sur l' immigration avec Gérard Collomb ou la SNCF avec Elisabeth Borne, c'est en partie à cause de ça. » Quand pédagogie il y a, elle est aride. « Lorsque certains, y compris dans l'exécutif, disent qu'on fait la loi ferroviaire parce qu'elle nous est imposée par l'Europe ou parce qu' il faut réduire la dette, c'est catastrophique, enrage un autre député macroniste. Si on veut que l'opinion publique ne se renverse pas, il faut plutôt expliquer aux gens pourquoi cette réforme va leur apporter un meilleur service. Mais maintenant on est bloqué, on n'arrive pas à dire cela. »

"Surcommunication"

La semaine dernière, l'Elysée a bien demandé à Edouard Philippe de mouiller un peu plus la chemise. Le Premier ministre a donc ajouté à son agenda une interview matinale sur France Inter, avant d'accorder un entretien au Parisien, histoire de marteler que le gouvernement irait « jusqu'au bout ». Mais, à l'instar de son mentor Juppé dont la rigidité s'est fracassée sur la réalité du pays, Edouard Philippe peine à imprimer lorsqu'il s'agit de convaincre les Français. « Le problème, c'est que Philippe et Macron se ressemblent trop. Macron aurait dû prendre un type de terrain pour le compléter », pointe un député LR qui connaît bien le Premier ministre et voit avant tout en lui « un brillant conseiller d'Etat ».
Ancien ministre du Travail sous Sarkozy, Eric Woerth pointe « un manque de prise en compte de l'opinion des gens. Cette dimension d' éloignement, l'exécutif essaie de la rattraper par une sur communication qui paraît assez artificielle ». Comme cette double séquence interview inédite. Jeudi 12 avril, Emmanuel Macron s'exprimait devant Jean-Pierre Pernaut dans le journal télévisé le plus regardé d'Europe. L'occasion de s'adresser aux retraités impactés par la baisse de la CSG, mais également « à la France de province qui travaille et rentre chez elle déjeuner. Une France à qui le président a du mal à parler », observe un familier de l'Elysée. Le soir du dimanche 15 avril, le chef de l'Etat est attendu devant le tandem baroque Jean-Jacques Bourdin - Edwy Plenel. « Avec un vrai risque de se cannibaliser lui-même », poursuit cette source, pas franchement emballée par ce format, ni pas l'horaire d'ailleurs : « Un dimanche soir à cette heure-là, pile en même temps que le match PSG-Monaco, il ne peut compter que sur les reprises dans les journaux et les réseaux sociaux. » Mais qu'importent les conjectures sur le choix des journalistes et des médias, ces détails d'agenda. Les journalistes ne sont finalement, pour Emmanuel Macron, qu'une autre de ces catégories qui font barrage entre l'Elysée et le vulgumpecus.
Une société aux corps intermédiaires atrophiés, c'est une société « dans laquelle il est plus facile de manipuler l'opinion », a estimé François Hollande. Mais les Français sont en train d'en faire l'expérience : c'est aussi une société plus âpre, avec une conduite politique sans amortisseurs. Résultat, les territoires ressemblent de plus en plus à des Cocotte-Minute. « Je redoute que la reprise ne concerne que les métropoles et que les quartiers défavorisés en soient exclus, s'alarme le député UDI Francis Vercamer, élu de Roubaix, dans le Nord. Si on crie cocorico sur tous les toits, les gens vont vouloir leur part du gâteau. » Et de lancer cet avertissement : « Le gouvernement est en train d 'agréger des mécontentements un peu partout. Les cheminots, les professionnels de santé, les retraités, les automobilistes… Tout le monde gueule ! » La gronde dans les universités fait également office de révélateur. Très affaibli, le syndicat Unef ne contient plus les éléments les plus radicaux qui définissent eux-mêmes le périmètre de la lutte, comme c'est le cas à la fac de Tolbiac, à Paris (lire le reportage, p. 24). Cette tour de 22 étages n'est pas encore une « zone à défendre », comme Notre-Dame-des-Landes - il s'en est fallu de quelques voix en assemblée générale -, mais déjà une « commune libre ».

Cajôler les cathos

Voulait-il en expier les péchés ? Emmanuel Macron a intronisé le collège des Bernardins lundi 9 avril comme un nouveau Sacré-Cœur, cent quarante-sept ans après la révolte des communards. Devant la Conférence des évêques de France, le locataire de l'Elysée a fait une confession. Selon ce président garant de la Constitution et de son article 1 qui proclame une République indivisible, laïque, démocratique et sociale, le lien entre l'Eglise et l'Etat se serait « abîmé ». Les représentants catholiques en ont soupiré d'aise quand les figures de la majorité issues du PS, Richard Ferrand ou Olivier Dussopt, lorgnaient leurs souliers. Comme si, en guise de corps intermédiaires, Emmanuel Macron ne voulait retenir que les représentants des religions. Jouer de la fibre identitaire plutôt que de la fibre sociale ? Ce n'est pas un hasard si le président progresse dans le cœur des sympathisants LR, avec 57 % de bonnes opinions dans le dernier tableau de bord Ifop pour Paris Match. Un discours qui lui permet de poursuivre son grand-œuvre : la destruction des partis politiques, avec une prédilection pour Les Républicains. « Il y aurait une vraie offre sociale-démocrate en face, il procéderait autrement et ne tiendrait pas le discours de lundi, mais là, il a décidé d'accélérer la fracturation de la droite », observe l'un de ses interlocuteurs. Les Français ne s'y sont pas trompés qui, selon un sondage Ipsos pour le Monde, sont désormais une majorité à situer La République en marche à droite de l'échiquier politique.
« La question essentielle, c'est pourtant le projet social, c'est-à-dire une perspective dans laquelle ceux qui n'ont ni la richesse ni le pouvoir peuvent se retrouver », s'alarme un ami du président, alors qu'une autre étude révèle la disparité croissante des soutiens de Macron dans l'opinion. De plus en plus de cadres, de moins en moins de catégories populaires. Visiteur régulier du président, François Bayrou lui a fait parvenir les deux discours qu'il a tenus, lors de l'université d'été du MoDem et lors de son congrès. « Si, à l'intérieur d 'une société, le sentiment est que l'efficacité est obtenue au détriment de la justice, alors je vous le dis, en France, ce serait un échec », avait notamment mis en garde le Béarnais.

Descente dans l'arène

Dans l'entourage macroniste, on fait mine de ne pas voir le problème. « J e n'ai pas du tout le sentiment d'une fracture terrible et je ne vois pas Emmanuel Macron se faire crier dessus dans les territoires », martèle une proche du chef de l'Etat. A l'Elysée, on assure que le président dispose de capteurs efficaces sur le terrain : « Il a noué des relations pendant la campagne. Il y a aussi les députés de la majorité et le courrier de l 'Elysée, qui fait l 'objet chaque semaine d 'une synthèse communiquée au président et à son équipe. » Et on dément tout isolement : « Descendre dans l 'arène, ce n'est pas un problème pour lui. N'oubliez pas que c' était son mode de fonctionnement quand il était ministre : il allait systématiquement à la rencontre des manifestants. »
Le député LREM Roland Lescure abonde : « L'histoire de Macron qui resterait sur son Olympe, je n'achète pas du tout. Il discute avec les agriculteurs, les retraités, les professionnels de santé… Il va au contact et il aime ça. » Au mois de février, devant l'Association de la presse présidentielle, Emmanuel Macron s'était pourtant adressé cette propre mise en garde : « Je suis le fruit d'une brutalité de l' histoire. D'une effraction parce que la France était malheureuse et inquiète. Si j'oublie tout cela, cela sera le début de l' épreuve. » Reste à savoir si le chef de l'Etat s'écoute lui-même.


 

C’est l’intérêt général que défendent les cheminots



Les hommes du rail ne sont pas des privilégiés, mais l’avant-garde d’un mouvement de préservation des biens communs. Les Britanniques peuvent témoigner des effets de l’ouverture à la concurrence, et à la privatisation.

A la Libération, la France a choisi de lier la reconquête de sa liberté au souci de justice sociale. D’où le programme du Conseil national de la Résistance. La Sécurité sociale s’est construite sur l’admirable principe qui veut que l’on cotise selon ses moyens et que l’on reçoive des soins selon ses besoins. Délivré de la loi du marché, le sens du bien commun a prévalu. L’idée de service public, déjà incarnée en 1937 par la SNCF avec le Front populaire, permet à chaque personne d’accéder aux biens de première nécessité. Santé, instruction et culture, accès à l’eau et à l’énergie, au transport doivent être à la portée de tous sans que pèsent les inégalités géographiques et sociales. D’où la nécessité de services publics de caractère national, tournés exclusivement vers l’intérêt général. La France a ainsi montré la voie d’une société solidaire et juste, soucieuse des biens communs, et de la solidarité redistributive. L’Europe aurait pu faire de même.
Malheureusement, c’est l’homme d’affaires atlantiste Jean Monnet qui en a impulsé la construction par le biais d’une économie dissociée du social. L’ultralibéralisme a vu tout le parti qu’il pouvait tirer d’une telle Europe, y compris sur le plan idéologique : la paix entre les peuples a servi de prétexte et de travestissement à la dure loi de la dérégulation. Le capitalisme n’assure la compétitivité qu’en externalisant ses coûts écologiques, humains et sociaux. Il les abandonne à la puissance publique dont il critique pourtant toute intervention. L’assisté, c’est donc lui, puisqu’il ne prend pas en charge ces coûts alors que son idéologie prétend se fonder sur la responsabilité individuelle. Quant à l’idée d’une Europe fraternelle, elle a été dévoyée au point d’écœurer les peuples. On a voulu faire croire que la concorde nationale et internationale impliquait la concurrence libre et non faussée, assortie du moins disant social. D’où la privatisation à marche forcée des services publics, impulsée par la directive européenne 91/440.
Le Medef, par la voix de Denis Kessler, a fixé le cap le 4 octobre 2007 : «Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de le défaire méthodiquement.» L’Europe a exaucé ce vœu. Le sort réservé à la SNCF par Emmanuel Macron s’inscrit dans ce sillage. Au prix de préjugés honteux concernant les cheminots et le service public, hélas trop souvent colportés par certains médias. Des exemples. Les pannes et dysfonctionnement des trains ? Les cheminots n’y sont pour rien. La réduction drastique des dépenses de maintenance et de renouvellement du matériel pèse autant sur eux que sur les usagers, au passage rebaptisés «clients». Marché oblige. Chacun sait ce que fut le désastre de la privatisation du rail en Angleterre. (voir le film de Ken Loach, The Navigators).
Les «privilèges» prétendus des cheminots ? Ridicule et mensonger. La «prime charbon» a disparu dans les années 70. Rien d’arbitraire n’existe en la matière : on a jugé normal de prendre en compte les contraintes effectives du métier. Ne nous trompons pas de cible. Le régime des frais déductibles et des stock-options, les défiscalisations et les paradis fiscaux, les parachutes dorés sont quant à eux de vrais privilèges. La dette ? Les cheminots n’y sont pour rien. Le service public, non plus. Ce sont les politiques successives qui l’expliquent. Le tout-route a pris la place du rail, au détriment du fret ferroviaire et des lignes dites non rentables, mais aussi de l’environnement. La priorité aux TGV s’est conjuguée avec le délaissement des trains de proximité, délégués aux régions. Elle a coûté très cher. L’oubli de l’aménagement du territoire et de la nécessaire égalité de tous les citoyens, où qu’ils habitent, a rompu le principe de solidarité nationale. La péréquation qui fait que les régions riches aident les régions pauvres est un principe républicain, et structurant du service public. Il en allait ainsi des lignes qui dégagent des profits par rapport à celles qui ne le font pas.
Chaque personne doit pouvoir se déplacer pour un coût raisonnable. Comparons ce qui est comparable, au lieu d’agiter des images d’Epinal. Les Anglais paient leur transport trois à quatre fois plus cher que nous. Voulons-nous vraiment cela ? Le «service privé au public» qu’on nous propose comme alternative au service public authentique est une mystification. L’intérêt général n’y est pas aussi essentiel car il doit composer avec l’intérêt particulier. La mise en concurrence prépare inéluctablement la privatisation, et il n’est pas vrai que le maintien de capitaux publics nous préserve d’un tel processus. L’ouverture au capital privé, à terme, fera éclater le service public du rail, et, à travers lui, l’égalité des usagers, qui deviendront financièrement tributaires des limites de leurs lieux de vie. Aux uns, les TGV, aux autres, les autocars. Qui peut oser dire que le confort est le même, sinon les nantis qui ne souffriront pas des inégalités régionales et sociales ? Et tout cela au détriment de la responsabilité écologique.
Amis cheminots, tenez bon, car votre combat est de portée universelle. Au-delà de vos conditions de travail et de vie, qu’aucun prétexte ne doit permettre de négliger, vous défendez l’intérêt général. A rebours du dénigrement médiatique, nous sommes de plus en plus nombreux à vous soutenir, car votre mouvement est exemplaire. Vous portez l’idéal solidariste du service public. Votre lutte est un gage d’avenir. Celui d’une société qui préserve le sens du bien commun.

Le capitalisme est aujourd’hui obligé de casser les conquis sociaux. Voilà donc l’ennemi : le capitalisme



Par

Quand le sage montre la lune, beaucoup regarde le doigt ! Quand on est mécontent de Sarkozy, on choisit Hollande, puis mécontent de Hollande on vote Macron. Bientôt Macron deviendra impopulaire. Est-ce que la solution sera de voter pour un autre représentant de l’oligarchie capitaliste ? La question devient la suivante : « Est-ce que les citoyens, les travailleurs ont intérêt à se bouger uniquement pour changer de gérant du capital ?  »La société du spectacle souchée sur le dispositif médiatique du mouvement réformateur néolibéral tente toujours de nous pousser à changer de gérant du capital dès que celui qui est au pouvoir n’a plus assez de soutiens populaires. Et pour l’instant, il réussit à nous diviser.
D’abord, en attaquant le principe de laïcité. Jean Jaurès disait que sans la laïcité, il y aurait une division entre ouvriers catholiques et ceux qui ne le seraient pas. Et qu’avec la laïcité et la loi de séparation, la religion était reléguée dans la sphère privée des citoyens et que cela unifiaient le prolétariat en vue de satisfaire les revendications ouvrières (repos du dimanche-1906, retraites ouvrières et paysannes-1910, impôt sur le revenu-1914). En développant le relativisme culturel inhérent au mouvement réformateur néolibéral, le dispositif Macron réussit, pour l’instant, de diviser le camp progressiste sur ce thème mais en même temps, il développe le communautarisme religieux pour lui faire jouer certaines missions de service public qui lui sont transférées suite au processus de privatisation des services publics.
Mais aussi, en réussissant ici et là, à diviser le salariat en faisant rentrer dans les têtes que le malheur des chômeurs et des salariés sans statuts spéciaux sont dus à ceux qui ont des statuts spéciaux (salariés de l’énergie, de la SNCF, des trois fonctions publiques, etc.). Alors que le but du mouvement réformateur néolibéral est en fait de baisser le ratio de tous les salaires par rapport à la somme des richesses produites. Tout simplement parce qu’il a besoin de plus de dividendes pour alimenter la spéculation immobilière, seule possibilité d’avoir pour l’oligarchie des taux de profits élevés (but du capitalisme) depuis que les taux de profits dans l’économie réelle sont très bas (période néolibérale).
Aucune innovation technologique n’a réussi à faire remonter les taux de profits de l’ensemble de l’économie capitaliste contrairement aux innovations précédentes (électricité, machine à vapeur, automobile, train, avions, etc.). La guerre, moyen d’augmenter les taux de profits grâce à la destruction du capital ne peut avoir lieu qu’en dehors du monde développé vu les capacités de destruction massive des grands pays impérialistes en concurrence entre eux. L’intensification et la déshumanisation du travail a entraîné des nouvelles maladies professionnelles (surmenage, stress, troubles musculo-squelettiques, etc.) voire une augmentation du nombre de suicides sur les lieux du travail y compris dans la fonction publique. Il ne reste donc, pour les dirigeants du système, que la baisse des salaires directs et socialisés. D’où l’attaque contre le salariat et pour l’auto-entreprenariat, contre le Code du travail, l’attaque contre les statuts, contre la Sécurité sociale, l’école et les services publics. Et qu’il faut un autre modèle politique basé sur un nouveau mode de production pour retrouver le chemin de l’émancipation par l’augmentation du niveau de vie du plus grand nombre avec le développement de la sécurité sociale, de l’école et des services publics.
Comprenons également que pour faire baisser les salaires socialisés, il faut faire baisser toutes les retraites. Pour ce faire, le projet est de mettre tous les salariés et indépendants dans une caisse unique fonctionnant par points ou en comptes notionnels. Mais cela demande de casser préalablement les statuts spéciaux (type SNCF par exemple) et remplacer des fonctionnaires par des contractuels de droit privé.
Voilà pourquoi la résistance de tous les travailleurs à l’attaque contre les cheminots, contre la privatisation des services publics, contre les fonctions publiques est nécessaire. Si nous perdons cette bataille, ce sera encore plus dur pour tous après.
Avec ce que nous venons de dire, on comprend pourquoi le nouveau gérant du capital, Emmanuel Macron, soutenu par les dirigeants de la finance internationale, de l’Union européenne, du grand patronat, de la haute technocratie administrative, de la quasi-totalité des médias, des intellectuels organiques du capital, et des artistes également organiques du capital, veut aller vite. Car il doit faire cela avant la mi-mandat.
Voilà pourquoi le dispositif macronien s’est sorti du bourbier de Notre-Dame-des-Landes pour se concentrer sur l’attaque contre les cheminots et pour développer la privatisation massive des services publics et la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires (50.000 dans la fonction publique d’Etat et 70.000 dans la fonction publique territoriale) via le Comité Action Publique 2022 (CAP 22). Le premier ministre a annoncé le 13 octobre dernier que le but était d’organiser « des transferts au secteur privé, voire des abandons de missions ». Il devrait annoncer en mai 2018 les mesures précises. Outre les suppressions de postes de fonctionnaires et la déstructuration des missions de service public, on aura des embauches de contractuels de droit privé, la totale dématérialisation électronique d’ici 2002, la rémunération à la rentabilité, le renforcement du pouvoir des directeurs technocrates et la généralisation du « nouveau management public » (avec son lot de harcèlement, de stress, de maladies professionnelles nouvelles, de suicides sur les lieux de travail, etc.). Et là cela va impacter la vie quotidienne vu que tous les services publics y compris les services de proximité seront impactés.

Et nos tâches dans tout cela ?

Pour l’instant, suite aux manifestations du 22 mars, nous avons le conflit des cheminots qui perdure avec un début de solidarité financière par collecte électronique, la journée interprofessionnelle de la CGT le 19 avril et la montée parisienne pour une marche le 5 mai 2018 lancée par Ruffin et Lordon avec une partie des forces syndicales le 4 avril dernier à la Bourse du travail de Paris, marche soutenue par la France insoumise. Notre première tâche est de faire converger l’ensemble de ces forces syndicales et politiques car sans convergence pas de victoire possible.
Notre deuxième tâche consiste à mener dans un moment de luttes sociales la bataille pour une nouvelle hégémonie culturelle pour combattre la division populaire comme notée en début d’article. Refusons la division du peuple et ciblons nos vrais adversaires qui participent de l’oligarchie capitaliste et de leurs alliés. Rassemblons le salariat et refusons le recul des conquis sociaux. Développons le lien entre le combat laïque et le combat social pour rassembler et promouvoir la souveraineté populaire. Le tout en utilisant toutes les méthodes d’éducation populaire refondée (réunions publiques, conférences populaires sans conférenciers, cinés-débats, débat théâtral, ateliers de lecture, etc.)
Notre troisième tâche est de prendre le temps de la formation politique pour ne pas déléguer le processus décisionnaire à des élites même populaires.
Si le combat social est une priorité immédiate pour lutter contre la politique mortifère et destructrice d’Emmanuel Macron, deux enjeux demeurent que nous aurions tort de mettre en seconde priorité. La crise écologique (climat, biodiversité, pollutions) demeure n’en déplaise au silence de Nicolas Hulot et la planification écologique est une exigence par rapport à l’appétit sans limite des tenant du néo-libéralisme. Raison de plus pour soutenir également le versant écologique de la lutte des cheminots dans la période car un politique écologique appelle le transfert programmé de la route vers le train tant pour les voyageurs que pour le fret. C’est-à-dire tout le contraire de la politique du gouvernement et de la direction de la SNCF. Cette dernière a développé des filiales privées de transport par route pour concurrencer le rail !
Le second enjeu est la crise migratoire que l’on peut résumer par ces deux chiffres, 25 millions de réfugiés climatiques en 1998, 250 millions à l’horizon 2050. Le bouleversement attendu de nos sociétés ne sera pas réglé par la loi Asile et Immigration telle qu’elle est présentée par Gérard Collomb, le sinistre d’Etat, au nom du gouvernement actuel.
Il y a encore loin de la coupe aux lèvres mais l’espoir demeure. Hauts les cœurs et échangeons entre nous.