Lors
de son discours au collège des Bernardins ce lundi 9 avril, le
Président a une nouvelle fois tendu la main de manière appuyée aux
catholiques. Mais cette fois-ci, le discours d'Emmanuel Macron est allé
tellement loin qu'il a parfois semblé négliger la séparation de l'Eglise
et de l'Etat, et a provoqué la fureur des défenseurs de la laïcité.
Et
si le grand discours d'Emmanuel Macron sur la laïcité, que beaucoup
attendent avec impatience depuis des mois, avait eu lieu ce lundi 9
avril ? Si tel a été le cas, tous les citoyens attachés à ce principe
fondateur de la République devraient être amèrement déçus. Car devant la
conférence des évêques, au collège des Bernardins de Paris, le
Président a tenu un discours déroutant, tant il a tendu la main de
manière appuyée à l'Eglise catholique.
Le contexte n'était
pourtant pas le plus aisé pour le chef de l'Etat. Même s'il adresse
régulièrement des signaux aux Français de confession catholique - qui en
évoquant une "radicalisation de la laïcité", qui en célébrant Jeanne d'Arc, la "transcendance" et la "mystique"
-, sa politique peut heurter les chrétiens. Le pape François tance
régulièrement les chefs d'Etat, dont Macron, qu'il accuse de ne pas
accueillir assez généreusement les réfugiés, et surtout, le Président a
prévu plusieurs lois sur la bioéthique : l'une pour légaliser
l'euthanasie, l'autre pour étendre la procréation médicalement assistée
(PMA) aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Ces
préoccupations ont été soulevées par l'archevêque de Marseille Georges
Pontier, dans un discours d'adresse à Emmanuel Macron.
"Le lien entre l'Eglise et l'Etat s'est abîmé, il nous importe à vous comme à moi de le réparer"
Or
pour complaire à l'épiscopat, réuni devant lui ce lundi soir au collège
des Bernardins, le Président est allé loin. Très loin. Dès le début de
son discours, Emmanuel Macron lâche : "(...) Nous partageons
confusément le sentiment que le lien entre l’Église et l’État s’est
abîmé, et qu’il nous importe à vous comme à moi de le réparer." Que
peut bien signifier une telle phrase ? Depuis la loi de 1905, l'Etat et
l'Eglise sont strictement séparés. La République ne reconnaît, ne
salarie ni ne subventionne aucun culte. Si le dialogue entre les
instances de pouvoir et les autorités confessionnelles est évidemment
bénéfique, la religion ne saurait avoir la moindre influence dans les
décisions publiques. Une distinction fondamentale qu'Emmanuel Macron a
donné le sentiment de négliger dans son discours.
Drague appuyée en direction des catholiques
En effet, le Président a semblé vouloir porter une attention particulièrement forte aux catholiques : "Je considère de ma responsabilité de ne pas laisser s’éroder la confiance des catholiques à l’égard de la politique", a-t-il déclaré, se disant "convaincu que la sève catholique doit contribuer encore et toujours à faire vivre notre Nation." Vantant "la conciliation du droit et de l'humanité" que mettrait en œuvre le gouvernement concernant les migrants, Emmanuel Macron a voulu aussi rassurer les chrétiens sur la PMA. Là encore de manière très nette : "J’entends
votre voix lorsqu’elle nous invite à ne rien réduire à cet agir
technique dont vous avez parfaitement montré les limites. J’entends la
place essentielle que vous donnez dans notre société à la famille, aux
familles, oserais-je dire. J’entends aussi ce souci de savoir conjuguer
la filiation avec les projets que des parents peuvent avoir pour leurs
enfants."
Poussant toujours plus loin le curseur, le Président est allé jusqu'à affirmer que "tous
les jours, les mêmes associations catholiques et les prêtres,
accompagnent des familles monoparentales, des familles divorcées, des
familles homosexuelles, des familles recourant à l’avortement, à la
fécondation in vitro, à la PMA (...) L'Eglise accompagne inlassablement ces situations délicates et tente de concilier ses principes et le réel".
La mémoire collective, elle, avait davantage retenu l'opposition
farouche, souvent virulente de l'Eglise au divorce, à l'acceptation de
l'homosexualité, au droit à l'IVG, puis au mariage pour tous. Le
président de SOS Homophobie Joël Deumier a souligné cette contradiction sur LCI, évoquant un discours "très maladroit et choquant". alors "qu’en
réalité l’Eglise s’oppose à la pleine reconnaissance des familles
homoparentales, du droit des enfants et de la protection des familles."
Hadrien Mathoux
Hadrien Mathoux
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