Hugo Baudino avec AFP
En obtenant de l'Etat la prolongation de leur concession en échange de la réalisation de certains travaux de rénovation, les sociétés autoroutières ont pu multiplier leur mise par 5!
Alors que la cession des actions de l’Etat
dans les aéroports de Paris est en train de se concrétiser, un autre cas
de privatisation fait à nouveau parler...
En 2005, l’Etat décide de vendre ses parts dans les sociétés
concessionnaires d'autoroutes à trois groupes: Vinci, Eiffage et
Abertis. Cette décision fait couler beaucoup d'encre, de nombreuses voix
s'élèvent alors contre ce qui était alors considéré comme la vente des
bijoux de famille.
Mais c’est une décision prise dix ans plus tard qui a été dénoncée
par la Cour des comptes dans un référé rendu public jeudi. En avril
2015, l’Etat signe une prolongation des concessions des sociétés gérant
le réseau autoroutier en échange de la réalisation de certains travaux.
La Cour des comptes critique une "solution de facilité" prise dans
des négociations "dans lesquelles les pouvoirs publics sont souvent
apparus en position de faiblesse". Les deux ministres à la manoeuvre à
l'époque étaient Ségolène Royal (Ecologie et Transports) et Emmanuel
Macron (Economie).
15 milliards d'euros de recettes pour 3,2 milliards de travaux
Car, selon la Cour des Comptes les sociétés concessionnaires
d’autoroutes devraient tirer quelque 15 milliards d'euros de la
prolongation de concession qui leur a été accordée en 2015, alors que le
montant des travaux réalisés en échange ne représente que 3,2 milliards
d’euros.
L'Etat a décidé à trois reprises ces dix dernières années d'allonger
les concessions des sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA),
moyennant compensation, afin de réaliser des travaux sur des segments
autoroutiers qui n'étaient pas prévus dans la convention de concession.
Certains travaux ont aussi fait l'objet de compensations alors qu'ils
étaient déjà prévus dans les cahier des charges des sociétés et pris en
charge par les péages.
Une solution qui n'empêche pas les hausses de tarifs aux péages
La Cour des comptes reconnaît que l'allongement des concessions
permet de ne pas mobiliser de nouvelles ressources publiques ou
d'augmenter les péages immédiatement pour financer les travaux.
Toutefois, cette solution ne fait que repousser le problème et finit par
représenter un surcoût pour l'usager. La formule repousse également le
bénéfice de la remise en concurrence des concessions.
Dans son rapport, la Cour regrette que le montant des compensations
accordées aux SCA - fixé selon des calculs prenant en compte coût des
travaux, inflation, trafic routier, risque et taux de rentabilité des
investissements privés - fasse l'objet de négociations souvent
favorables aux concessionnaires.
L'institution recommande un encadrement plus strict des compensations
par un organisme indépendant. Pour éviter les "surcompensations", elle
propose de préciser les dispositifs de modération des péages et de
réduction des concessions.
Les tarifs des péages autoroutiers ont
augmenté de 1,8% à 1,9% en février dernier, conformément aux contrats
liant des sociétés comme Vinci et l'Etat. Un sujet sensible alors que
des "gilets jaunes" ont régulièrement bloqué des péages autoroutiers
pour protester contre leurs tarifs.
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