Par Louis Nadau
Alors
que les pays de l'Union européenne sont incapables de s'accorder sur
une taxation des Gafa, la presse néerlandaise a révélé le 2 janvier que
Google avait transféré 19,9 milliards d'euros vers le paradis fiscal des
Bermudes en 2017.
"Il est possible de gagner de l'argent sans vendre son âme au diable".
Cette phrase a figuré pendant de nombreuses années dans la charte des
valeurs de Google. Elle n'y est plus. Il faut dire que le cynisme de
l'entreprise américaine s'est totalement débridé. En 2017, le géant du
web, qui continue d'affirmer dans un communiqué "payer toutes les taxes que nous devons et se conformer aux règles fiscales de tous les pays dans lesquels il opère",
a déplacé 19,9 milliards d'euros de profits vers le paradis fiscal des
Bermudes, grâce à un habile tour de passe-passe financier. Le quotidien néerlandais FD
a publié mercredi 2 janvier les comptes annuels de la filiale
hollandaise de Google, déposés à la Chambre de commerce du royaume,
mettant en lumière cette manœuvre d'optimisation fiscale.
S'affranchissant
volontiers de ses préceptes moraux, Google a choisi de profiter au
maximum de la division des pays de l'Union européenne sur la fiscalité
des Gafa et de la faille volontairement introduite par l'Irlande dans la
législation pour accueillir la firme. Le montage financier utilisé par
Google consiste en une série de société écrans qui permet de délocaliser
les bénéfices réalisés à l'étranger par l'entreprise aux Bermudes, où
ils ne sont pas soumis à l'impôt. Google Netherlands Holdings BV sert
ainsi à faire transiter les bénéfices étrangers de Google vers une
filiale irlandaise du groupe, basée aux Bermudes, une île de 70.000
habitants située au large des Etats-Unis, appartenant au Royaume-Uni, et
dans laquelle les entreprises de payent pas d'impôts. L'équivalent du
PIB d'un pays comme le Sénégal s'évapore ainsi dans un paradis fiscal...
Déjà 15,9 milliards exfiltrés en 2016
La
loi irlandaise autorisant ce resquillage sera rectifiée en 2020, après
que l'Union européenne et les Etats-Unis ont tapé du poing sur la table.
D'ici là, la multinationale met donc le maximum d'argent au chaud aux
Bermudes, ce qui lui permet de ne payer, au maximum, que 14 millions
d'euros d'impôts en France. En 2014 et 2016, Google avait déjà réalisé
ce type d'opération, comme le rappelle Les Echos, en faisant perdre 11 puis 15,9 milliards d'euros d'impôts aux pays dans lesquels l'entreprise américaine s'enrichit.
Les
propriétaires du moteur de recherche n'ont pas de quoi se faire de
cheveux blancs quant à une réponse forte de l'Union européenne. Le 4
décembre, la taxe Gafa – acronyme désignant Google, Apple, Facebook,
Amazon et Microsoft -, qui consiste à imposer les seuls revenus de la
publicité sur Internet, a été repoussée en raison de l’opposition de
quatre pays membres : l’Irlande, la Suède, la Finlande et le Danemark.
Le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, tentera en mars d'en
faire adopter une nouvelle mouture.
En attendant, une taxe franco-française instaurée début 2019 doit permettre, selon le locataire de Bercy, de collecter "500 millions d'euros" auprès de tous les géants du numérique réunis. Autant dire que la facture devrait rester symbolique à l'échelle de Google.
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