vendredi 4 janvier 2019

Grâce à la législation européenne, Google déplace l'équivalent du PIB du Sénégal dans un paradis fiscal



Alors que les pays de l'Union européenne sont incapables de s'accorder sur une taxation des Gafa, la presse néerlandaise a révélé le 2 janvier que Google avait transféré 19,9 milliards d'euros vers le paradis fiscal des Bermudes en 2017.

"Il est possible de gagner de l'argent sans vendre son âme au diable". Cette phrase a figuré pendant de nombreuses années dans la charte des valeurs de Google. Elle n'y est plus. Il faut dire que le cynisme de l'entreprise américaine s'est totalement débridé. En 2017, le géant du web, qui continue d'affirmer dans un communiqué "payer toutes les taxes que nous devons et se conformer aux règles fiscales de tous les pays dans lesquels il opère", a déplacé 19,9 milliards d'euros de profits vers le paradis fiscal des Bermudes, grâce à un habile tour de passe-passe financier. Le quotidien néerlandais FD a publié mercredi 2 janvier les comptes annuels de la filiale hollandaise de Google, déposés à la Chambre de commerce du royaume, mettant en lumière cette manœuvre d'optimisation fiscale.
S'affranchissant volontiers de ses préceptes moraux, Google a choisi de profiter au maximum de la division des pays de l'Union européenne sur la fiscalité des Gafa et de la faille volontairement introduite par l'Irlande dans la législation pour accueillir la firme. Le montage financier utilisé par Google consiste en une série de société écrans qui permet de délocaliser les bénéfices réalisés à l'étranger par l'entreprise aux Bermudes, où ils ne sont pas soumis à l'impôt. Google Netherlands Holdings BV sert ainsi à faire transiter les bénéfices étrangers de Google vers une filiale irlandaise du groupe, basée aux Bermudes, une île de 70.000 habitants située au large des Etats-Unis, appartenant au Royaume-Uni, et dans laquelle les entreprises de payent pas d'impôts. L'équivalent du PIB d'un pays comme le Sénégal s'évapore ainsi dans un paradis fiscal...

Déjà 15,9 milliards exfiltrés en 2016

La loi irlandaise autorisant ce resquillage sera rectifiée en 2020, après que l'Union européenne et les Etats-Unis ont tapé du poing sur la table. D'ici là, la multinationale met donc le maximum d'argent au chaud aux Bermudes, ce qui lui permet de ne payer, au maximum, que 14 millions d'euros d'impôts en France. En 2014 et 2016, Google avait déjà réalisé ce type d'opération, comme le rappelle Les Echos, en faisant perdre 11 puis 15,9 milliards d'euros d'impôts aux pays dans lesquels l'entreprise américaine s'enrichit.
Les propriétaires du moteur de recherche n'ont pas de quoi se faire de cheveux blancs quant à une réponse forte de l'Union européenne. Le 4 décembre, la taxe Gafa – acronyme désignant Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft -, qui consiste à imposer les seuls revenus de la publicité sur Internet, a été repoussée en raison de l’opposition de quatre pays membres : l’Irlande, la Suède, la Finlande et le Danemark. Le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, tentera en mars d'en faire adopter une nouvelle mouture.

En attendant, une taxe franco-française instaurée début 2019 doit permettre, selon le locataire de Bercy, de collecter "500 millions d'euros" auprès de tous les géants du numérique réunis. Autant dire que la facture devrait rester symbolique à l'échelle de Google.

 

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