Editorial de Eric Coquerel, co-coordinateur politique du parti de gauche
Il reste 20 jours de campagne. C’est peu et c’est beaucoup. C’est peu, au regard des 14 mois passés depuis l’annonce de candidature de Jean-Luc Mélenchon. C’est beaucoup, car une majorité de nos concitoyen-ne-s ne sont en réalité entré-e-s dans la campagne qu’à partir du débat du 20 mars sur TF1. En 20 jours on a déjà renversé bien des montagnes. Une petite vingtaine de jours, c’est le temps qu’il a fallu, par exemple, entre la convocation de l’assemblée constituante le 9 juillet 1789 et l’abolition des privilèges et du féodalisme dans la nuit du 4 août, avec entre les deux la prise de la Bastille…
Somme toute, la montagne qui se dresse devant nous est bien moins haute. Sur le terrain, tout confirme à la fois une proportion inédite d’indécis-e-s mais aussi un intérêt grandissant pour la campagne. Le paradoxe n’est qu’apparent : les gens ne supportent plus le jeu politicien mais s’intéressent à la politique dès lors qu’elle s’adresse à leur intelligence. Dans les dizaines de réunions de France Insoumise organisées chaque semaine dans le pays, il y a comme un air de campagne référendaire du TCE de 2005 : elles sont toutes combles et, surtout, on y constate la même soif du débat argumenté afin de se faire une opinion. Dans ce contexte, le sérieux de notre programme l’Avenir en commun marque des points. Ils sont de plus en plus à l’appréhender pour ce qu’il est : le programme d’une force qui entend bien changer les institutions et gouverner le pays en mettant le peuple en mouvement.
Depuis le 20 mars, Jean-Luc Mélenchon incarne une rupture tranquille, une issue pacifique par le haut aux dangers qui nous guettent. Ce qui est, après tout, une bonne manière de concevoir une révolution citoyenne. Les « pourquoi pas Jean-Luc Mélenchon ? » reviennent un peu partout. Transformons la question en réponse positive et la vague qui nous porte nous amènera jusqu’à bon port.
Jusqu’au dernier jour de campagne, c’est bien sur notre programme qu’il faudra s’appuyer. Il est notre atout maître. Il est la marque d’un choix. Le vote Mélenchon, c’est le refus du TINA, le « There Is No Alternative » de Margaret Thatcher incarné aujourd’hui par Emmanuel Macron ou François Fillon.
Il n’y a pas de loi naturelle à la faculté du capitalisme financiarisé d’en faire à sa guise. Il n’échappe au contrôle des peuples que lorsque des politiques lui ont permis de le faire. En Europe, rien n’obligeait nos gouvernants à faire face à la crise des subprimes en décidant, cas unique au monde, de rajouter de l’austérité à l’austérité. Rien ne les contraignait à faire de la BCE un outil au service unique de la finance et de l’ordolibéralisme. Tout est inscrit dans des traités qui ne sont pas tombés de la cuisse de Jupiter, mais qui ont été conçus, signés, sans cesse aggravés par ceux-là mêmes que nous avons élus. Rien ne les obligeait à négocier le CETA ou autres TAFTA. Cet abandon complice aux règles du libre-échange, de la dérégulation, du tout marché et du tout profit est une décision politique. Une autre peut donc la défaire pour rebâtir un projet d’échange et de coopération avec ceux qui souhaiteront le partager.
Il n’est que les déclinistes intéressés par la marche actuelle du monde pour donner à voir une France faible et isolée dans le concert international. Interrompons leur verbiage doloriste. D’une part, la France aurait les marges de manœuvre que lui permettent son poids économique et son marché intérieur dès lors qu’un gouvernement s’en donnerait les moyens, à commencer par un contrôle des capitaux. D’autre part, il y a fort à parier que nous ne serions pas longtemps seuls dans la voie ainsi ouverte. La France a montré dans le passé combien elle avait valeur d’exemple dès lors qu’elle se faisait porte-étendard de valeurs universelles. Or, privilégier l’intérêt général au lieu de celui, absolutiste, des marchés est une cause universelle qui vaut bien celle d’en avoir fini avec la monarchie.
Le choix Mélenchon, c’est aussi le refus de celui de la haine incarnée par Marine Le Pen. Non contente de ses choix libéraux en matière économique (ah, son éclairant « j’ai toujours été contre les 35 heures d’ailleurs je propose un retour aux 39 heures négociées par branche » à la table ronde du Medef !), et de son projet racialiste et xénophobe incarné par la constitutionnalisation de la préférence nationale et l’instauration du droit du sang, Marine Le Pen a expliqué en outre que la sortie de l’Euro permettrait à « la France de conquérir le monde ». Le libre-échangisme et le protectionnisme agressif du FN ont au fond en commun d’orchestrer une guerre économique mondiale. Pour le FN, comme pour l’extrême-droite des années 30, elle s’appuie sur la « race » et un affrontement entre puissances nationales-capitalistes. On en connaît les dégâts dans l’histoire.
Oui, à 20 jours du premier tour, et plus que jamais, le choix Mélenchon est la seule alternative crédible à la règle d’or d’Emmanuel Macron et la règle brune de Marine Le Pen. Il est donc plus que jamais le vote nécessaire. Nous sommes de plus en plus nombreux, des millions même, à le penser. Encore un dernier effort de conviction autour de nous : le meilleur est réellement à portée de main et de parole !
Eric Coquerel
Co-coordinateur politique
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