Après l'université de Bordeaux, de Montpellier ou encore Tolbiac
(Paris-I), le site de Censier (Paris-III) a été évacué par les forces de
l'ordre ce lundi 30 avril. Si le mois a été marqué par les différents
blocages et une mobilisation musclée des étudiants opposés à la
sélection, ces derniers semblent davantage miser sur la rue en mai.
Après le fracas lié aux blocages, la perte de vitesse ? Au lendemain
des vacances scolaires d'avril, c'est incontestable : le mouvement
étudiant contre la loi "relative à l'orientation et à la réussite des
étudiants" (ORE) et la sélection à l'université semble s'essouffler. Ou
en tout cas, il cale. Il y a 10 jours, "Tolbiac"
tombait. Par une intervention policière, le site Pierre Mendès-France
de l'université Paris-I, point emblématique de la mobilisation, s'est
vidé de ses occupants, de ses "bloqueurs". Même chose - au même
moment - pour ceux de "Paul-Valéry" à Montpellier, puis du campus de la
Victoire (Sociologie-Psychologie) de Bordeaux quelques jours plus tard.
Et ce lundi 30 avril, au tour de Censier (Paris-III) d'être "libéré" par un contingent de CRS. Face aux "déblocages" de ces bastions de la contestation, Emmanuel Macron a jugé que la situation dans les campus allait "vers l'apaisement". Vraiment ?
"Nous ne devons plus agir seul mais en synergie"
A la manœuvre derrière ces occupations, les syndicats étudiants traditionnels ne veulent pas croire à une mort annoncée. "Pour un mouvement étudiant, les vacances sont toujours synonymes de coup de moins bien. Mais ça va repartir", prédit Florent Chapelle auprès de Marianne, porte-parole de Solidaires étudiants, mentionnant une "nouvelle vague" à venir. "Ce n'est pas du tout terminé", lançait Lilâ Le Bas, présidente de l'Unef, au micro d'Europe 1
la semaine dernière. Pourtant, seuls deux sites sont aujourd'hui
entièrement bloqués (Toulouse et Rennes-II), contre quatre au plus fort
du mouvement. Et un peu moins d'une dizaine de sites sont confrontés à
des perturbations, moitié moins qu'il y a un mois.
Face à cet effritement, aucun plan n'est pourtant dressé. Si des tentatives de blocages sont à prévoir, il n'existe pas de "calendrier" comme
nous l'indique Solidaires étudiants. Même en ce qui concerne une
éventuelle reprise de Tolbiac ou de Censier, où la mobilisation était
particulièrement forte. "Face à la répression policière, difficile de faire face, se résout Florent Chapelle. Mais
nous ne comptons pas abandonner la mobilisation pour autant, nous
allons simplement nous repositionner sur un autre terrain." Lequel ? "Puisque nous sommes mis à la rue, autant la prendre."
Des manifestations sont prévues pour le jeudi 3 mai dans toute la France. Le but affiché : peser davantage… et rassembler ! "Pour
faire plier le gouvernement, nous ne pouvons plus agir seul, mais en
synergie avec tous les syndicats de l'éducation opposés à la politique
du gouvernement", justifie-t-il. Dans toute la France, des cortèges
se formeront pour dire non à la loi ORE à l'appel de plusieurs syndicats
étudiants, enseignants mais aussi lycéens. Une catégorie directement
concernée par Parcoursup et paradoxalement éloignée des débats sur le
sujet. "Maintenant, c'est quitte ou double, avoue Louis Boyard, président de l'Union nationale des lycéens (UNL), à Marianne. Le
bac approche, c'est le moment pour que ça prenne, que ça devienne un
mouvement d'ampleur. De notre côté, ce n'est pas pendant les épreuves
que ça va s'enflammer."
Les premiers avis de Parcoursup pour relancer le mouvement?
Une autre date est également très attendue du côté des protestataires : le 22 mai, jour des premiers "avis" concernant l'orientation des lycéens émis sous l'ère nouvelle de Parcoursup, successeur de feu APB (Admission post-bac). "Dans
les lycées, les élèves se sont rendu compte de la lourdeur et de
l'absurdité de Parcoursup au moment de rédiger un nombre conséquent de
lettres de motivation qui, pour la plupart, ne seront pas lues. Mais le
22 mai, si nous sommes nombreux (lycéens ou étudiants en réorientation) à
nous retrouver éloignés des formations que nous souhaitions intégrer,
ce sera terrible", veut croire le représentant de l'UNL. "Ce sera
l'occasion d'aborder la question du nombre de places qui doivent être
créées. Le sentiment d'injustice peut gonfler le mouvement", ajoute
le porte-parole de Solidaires étudiants, certain de pouvoir capitaliser
sur des dysfonctionnements qui pourraient affaiblir le gouvernement.
Après 8 semaines de blocages, la mobilisation massive de la jeunesse se
rêve plus qu'elle ne se vit. Il n'en faut d'ailleurs pas plus à Jimmy
Losfeld, président de la Fage, premier syndicat étudiant et qui
s'affiche comme "réformiste", pour l'enterrer. Lui qui s'est positionné en faveur de la réforme, malgré "quelques réserves sur les moyens accordés à son application". "Ce mouvement de blocages est né minoritaire et finira minoritaire, tranche-t-il, interrogé par Marianne. Le
discours n'a jamais pris, il ne repose que sur des formules
incantatoires… La loi ORE mérite un débat. Mais les actions de blocages
décrédibilisent le camp étudiant." Le nouveau mai 68 s'éloignerait-il ?
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