mardi 1 mai 2018

Face à l'essoufflement des blocages de facs, les étudiants veulent prendre la rue

Tolbiac, Montpellier et les autres...


Par Anthony Cortes

Après l'université de Bordeaux, de Montpellier ou encore Tolbiac (Paris-I), le site de Censier (Paris-III) a été évacué par les forces de l'ordre ce lundi 30 avril. Si le mois a été marqué par les différents blocages et une mobilisation musclée des étudiants opposés à la sélection, ces derniers semblent davantage miser sur la rue en mai.

Après le fracas lié aux blocages, la perte de vitesse ? Au lendemain des vacances scolaires d'avril, c'est incontestable : le mouvement étudiant contre la loi "relative à l'orientation et à la réussite des étudiants" (ORE) et la sélection à l'université semble s'essouffler. Ou en tout cas, il cale. Il y a 10 jours, "Tolbiac" tombait. Par une intervention policière, le site Pierre Mendès-France de l'université Paris-I, point emblématique de la mobilisation, s'est vidé de ses occupants, de ses "bloqueurs". Même chose - au même moment - pour ceux de "Paul-Valéry" à Montpellier, puis du campus de la Victoire (Sociologie-Psychologie) de Bordeaux quelques jours plus tard. Et ce lundi 30 avril, au tour de Censier (Paris-III) d'être "libéré" par un contingent de CRS. Face aux "déblocages" de ces bastions de la contestation, Emmanuel Macron a jugé que la situation dans les campus allait "vers l'apaisement". Vraiment ?

"Nous ne devons plus agir seul mais en synergie"

A la manœuvre derrière ces occupations, les syndicats étudiants traditionnels ne veulent pas croire à une mort annoncée. "Pour un mouvement étudiant, les vacances sont toujours synonymes de coup de moins bien. Mais ça va repartir", prédit Florent Chapelle auprès de Marianne, porte-parole de Solidaires étudiants, mentionnant une "nouvelle vague" à venir. "Ce n'est pas du tout terminé", lançait Lilâ Le Bas, présidente de l'Unef, au micro d'Europe 1 la semaine dernière. Pourtant, seuls deux sites sont aujourd'hui entièrement bloqués (Toulouse et Rennes-II), contre quatre au plus fort du mouvement. Et un peu moins d'une dizaine de sites sont confrontés à des perturbations, moitié moins qu'il y a un mois.

Face à cet effritement, aucun plan n'est pourtant dressé. Si des tentatives de blocages sont à prévoir, il n'existe pas de "calendrier" comme nous l'indique Solidaires étudiants. Même en ce qui concerne une éventuelle reprise de Tolbiac ou de Censier, où la mobilisation était particulièrement forte. "Face à la répression policière, difficile de faire face, se résout Florent Chapelle. Mais nous ne comptons pas abandonner la mobilisation pour autant, nous allons simplement nous repositionner sur un autre terrain." Lequel ? "Puisque nous sommes mis à la rue, autant la prendre."
Des manifestations sont prévues pour le jeudi 3 mai dans toute la France. Le but affiché : peser davantage… et rassembler ! "Pour faire plier le gouvernement, nous ne pouvons plus agir seul, mais en synergie avec tous les syndicats de l'éducation opposés à la politique du gouvernement", justifie-t-il. Dans toute la France, des cortèges se formeront pour dire non à la loi ORE à l'appel de plusieurs syndicats étudiants, enseignants mais aussi lycéens. Une catégorie directement concernée par Parcoursup et paradoxalement éloignée des débats sur le sujet. "Maintenant, c'est quitte ou double, avoue Louis Boyard, président de l'Union nationale des lycéens (UNL), à Marianne. Le bac approche, c'est le moment pour que ça prenne, que ça devienne un mouvement d'ampleur. De notre côté, ce n'est pas pendant les épreuves que ça va s'enflammer."

Les premiers avis de Parcoursup pour relancer le mouvement?

Une autre date est également très attendue du côté des protestataires : le 22 mai, jour des premiers "avis" concernant l'orientation des lycéens émis sous l'ère nouvelle de Parcoursup, successeur de feu APB (Admission post-bac). "Dans les lycées, les élèves se sont rendu compte de la lourdeur et de l'absurdité de Parcoursup au moment de rédiger un nombre conséquent de lettres de motivation qui, pour la plupart, ne seront pas lues. Mais le 22 mai, si nous sommes nombreux (lycéens ou étudiants en réorientation) à nous retrouver éloignés des formations que nous souhaitions intégrer, ce sera terrible", veut croire le représentant de l'UNL. "Ce sera l'occasion d'aborder la question du nombre de places qui doivent être créées. Le sentiment d'injustice peut gonfler le mouvement", ajoute le porte-parole de Solidaires étudiants, certain de pouvoir capitaliser sur des dysfonctionnements qui pourraient affaiblir le gouvernement.

Après 8 semaines de blocages, la mobilisation massive de la jeunesse se rêve plus qu'elle ne se vit. Il n'en faut d'ailleurs pas plus à Jimmy Losfeld, président de la Fage, premier syndicat étudiant et qui s'affiche comme "réformiste", pour l'enterrer. Lui qui s'est positionné en faveur de la réforme, malgré "quelques réserves sur les moyens accordés à son application". "Ce mouvement de blocages est né minoritaire et finira minoritaire, tranche-t-il, interrogé par Marianne. Le discours n'a jamais pris, il ne repose que sur des formules incantatoires… La loi ORE mérite un débat. Mais les actions de blocages décrédibilisent le camp étudiant." Le nouveau mai 68 s'éloignerait-il ?


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